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Sainte Agathe

Même les géants ne purent gagner la bataille du ciel !

Voyez Athéna ensevelir Encelade sous l'énorme masse rocheuse projetée à travers l'espace.

Le géant ainsi réduit à l'immobilité ne peut qu'exprimer de temps en temps une immense colère à travers un souffle énorme et un râle puissant projetant son ire par le cratère de l'Etna.

La Sicile le maintient fermement sous le poids de ses roches.



Mais une autre bataille du ciel allait se jouer sur cette terre de contrastes et de drames.

Rome sentait la menace, comme un imperceptible changement des valeurs dans l'immense l'empire qu'il fallait garder sous la coupe des lois du monde romain et de son intercesseur entre la terre et les dieux, l'empereur Trajan Dèce qui supplanta son malheureux prédécesseur disparu au combat Philippe l'Arabe.

Un troupeau d'égarés se disant chrétiens vit leur nombre grandir, abandonnant les valeurs cultuelles de l'empire, prônant la charité, la vie chaste et frustre, l'existence d'un seul dieu véritable qui n'avait nul besoin de sacrifices rituels !

Cette opposition frontale avec la pratique ancestrale de la cité ne saurait être tolérée sans qu'il faille y voir quelque faiblesse de l'empire.

Il convenait donc de faire revenir le troupeau dans l'enclos de gré ou de force. Et l'empereur demanda à tous de renier leur pratique, de faire des sacrifices aux dieux tutélaires de Rome devant témoins et certifications ! Les récalcitrants n'avait qu'un issue: la mort.

 En Sicile, Catane s'éveillait alors que le soleil envahissait le ciel de sa clarté de feu, le temps était propice à la fête avec cette mer d'un bleu profond que l'on admirait depuis la terrasse de la villa du gouverneur Quintien.

Le personnage était petit et gras, il transpirait beaucoup et se déplaçait peu par ce temps chaud préférant la position allongée à l'ombre d'une treille d'où pendaient des grappes bien charnues qu'il faisait entretenir par quelques bataillons d'esclaves africains.

Il était sensible au panorama mais son esprit était torturé par l'image d'une pure beauté en la personne d'Agathe. Il la savait inféodée à la famille des chrétiens et germa dans son esprit veule et cruel, une idée lumineuse qu'il imagina vouée à la plus éclatante des réussites.

Il voulait la conduire devant lui et la contraindre à renier ses croyances. Une fois la chose faite, il pourrait la cueillir tant elle serait déconfite et sans arme, il aurait alors la beauté, le rang et la richesse et pourrait montrer à Rome qu'il savait s'y prendre pour faire revenir vers les saintes idoles tous ceux, pauvres comme riches, qui était sous sa haute autorité.

Ambition de géant dans un si petit corps à l'esprit si étroit !

 Il la fit amener devant lui.

-L'empereur demande que chacun suive le rituel de Rome, renonce à ses nouveaux dieux, et officialise ce reniement en offrant des sacrifices aux dieux de Rome. Il n'y a point d'échappatoire si ce n'est une mort cruelle ! Tu ne voudrais pas que ta beauté soit ternie par de viles tortures ?

-Je n'aurai plus de beauté si je reniai ma foie en mon seigneur. La mort me sera douce car je sais le retrouver pour un bonheur éternel.

-Devant ta résolution tu mériterais le supplice mais je vais te laisser le temps de réfléchir. Tu seras au service de cette femme qui vient maintenant et se nomme Aphrodisie, elle d' accueillera avec ses neufs filles et sera de bon conseil. Tu resteras un mois en sa demeure et je te retrouverai ensuite.

Agathe vit venir vers elle un troupeau de femelles, poitrines opulentes offertes, démarche qui attirait le regard des hommes présents et les commentaires à voix basse des femmes venues au spectacle.

Elle sut reconnaître les mêmes silhouettes que celles que l'on dévoilait dans les petites niches ou derrière les petites portes des lieux de luxure où les plaisirs de la chair s'achetaient pour des riens. Vierge en pays de luxure, le mois serait long.

Et les jours s'écoulèrent, chaque jour était un combat à livrer contre mille propositions, mille menaces.

 -Les hommes aiment qu'on leur résiste mais pas trop longtemps ! Ensuite ils te donneront tout ce dont tu rêves et tu pourra jouer avec eux !

-Je n'ai nul besoin de jouer et de chercher à m'enrichir, je suis riche de ma foi et mon bonheur dans mon seigneur et sans égal.

-Mais tu ne connais pas les plaisirs de l'amour qui sont choses admirables et te gardent en beauté.

-Ma beauté est intérieure et n'a nul besoin d'onguents et de crèmes odorantes . Il n' y a pas de plaisir plus grand que de rester chaste et pure pour l'amour de mon dieu.

D'autrefois elle recevait des menaces directes devant l'absence de progrès.

-Si tu ne changes pas je te ramène au gouverneur et tu finiras ta vie misérablement dans d'atroces souffrances.

-La mort ne me fait pas peur car elle m'ouvre la porte de la vie véritable à laquelle j'aspire.

Finalement il fallut se rendre à l'évidence, la jeune et belle jeune fille ne pliait pas.

 Et on se retrouva devant Quintien.

Avec la foule accourue pour entendre la sentence.

-N'es tu point de véritable noblesse ? 

-Oui, mon nom est connu et respecté en Sicile.

-Alors comment quelqu'un de juste noblesse peut se définir comme servante de ton seigneur Jésus ?

-La véritable noblesse est celle d'être engagé dans le service et la foi en mon seigneur !

-Et bien choisis ! Soit rester avec tes convictions et subir les pires supplices soit louer les dieux de Rome.

-Puis je émettre le vœu que votre épouse ressemble à Vénus et que vous ayez l'apparence de Jupiter.

Quintien n'apprécia pas l'argument et demanda qu'on la fouette pour l'outrage.

Mais Agathe persista:

-Pourqoi me faire battre ? Ou tu as honte de tes dieux et alors du renies les préceptes de Rome, ou tu leur accordes une divine grandeur et tu devrais être flatté du compliment !

-Suffit ! Arrête tes sornettes et adore les dieux de Rome où tu subiras les pires sévices.

-Je n'ai aucune crainte. Me jetterez-vous au lions ? Mon seigneur saura les rendre doux et oublier la faim qui les tenaille ! Me mettrez-vous sur un bûcher ? Mon seigneur saura éloigner les flammes ! Des supplice que vous infligerez à mon corps, le Sain Esprit saura me donner la force de ne point les sentir !

La foule était amusée de la joute oratoire et Quintien se trouva pris en défaut. Il perdait pied dans la bataille oratoire.

-Mettez là dans un cachot humide et sombre. Elle y réfléchira jusqu'à demain !

Agathe partit avec un sourire éclairant son visage et le pied léger.

Il saurait lui faire regretter cette impudence.

 Le lendemain la foule des curieux avait grossi. Elle sentait le sang.

-Abjures-tu ta foi en ce lieu et à cet instant ?

-Ma foi est intacte et je ne crains rien dans les mains de mon seigneur.

Quintien, dépité, fit signe de poursuivre sachant qu'il perdrait cette beauté qu'il convoitait tellement mais sa réputation passait avant. On emmena la belle Agathe sur la mécanique du chevalet où on lia les membres pour les étirer et les déchirer atrocement. Mais Agathe parlait toujours tranquillement:

-Tu déchires ma chair et tu la bats, mais j'y trouve une grande et pure joie comme la graine qui sort de l'épi sous les coups du fléau.

-Voilà qui en est assez ! Qu'on procède à la suite du supplice !

On usa de fortes tenailles pour lui tourner les mamelons et les étirer puis on coupa les deux seins. Cette pratique cruelle souleva un cri de dégoût et d'effroi dans la foule qui regardait médusée ce pauvre corps couvert de blessures infectes.

Mais la voix était toujours là qui vrillait les tympans de l'infâme.

-Te voilà bien peu respectueux de ce qui t'a nourri chez ta mère alors que tu étais tout enfant ! Mes deux seins sont à l'intérieur de moi tout comme ma foi et ne sauraient être coupés.

-Qu'on la remette au cachot sans médecine, sans visite, sans pain et sans eau ! Pour quatre jours !

 On traîna le pauvre corps décharné vers sa cellule où on la jeta. Elle n'y survivra pas !

Agathe pria le seigneur qu'il l'accueillât dans son royaume et s'endormit rompue de fatigue. Elle ne sut si c'était un rêve ou la réalité, mais elle crut distinguer un vieil homme accompagné d'un bel enfant dans son obscure cellule.

-N'aie pas honte, je viens t'apporter réconfort et j'ai suivi tes tortures. Je sais pouvoir te guérir !

-Je n'ai nulle honte à être devant vous qui pourriez être mon père. Quand à me guérir je n'ai nul besoin de médecine.

-Je suis chrétien comme toi alors n'ai aucune crainte !

-Je suis heureuse de vous rencontrer et je rends grâce au seigneur de sa bonté mais je n'ai nul besoin de soins pour me guérir !

-Mais pourquoi !

-Parce que mon seigneur dira une parole et je serai guérie.

-Et bien sache que mon nom est Pierre et qu'en son nom tu es guérie.

A ces mots il disparut. S'éveillât-elle de son rêve ?

Elle ne ressentait aucune douleur et observa que toutes les blessures avaient disparu et que sa poitrine était de nouveau en place. Elle rendit grâce au Seigneur et pria. Elle vit que la porte de la cellule était ouverte comme d'autres d'ailleurs. De pauvres ères passaient cherchant une sortie et lui dirent de partir et de profiter comme eux de la fuite des gardiens après que la grande lumière fut venue .

-Je ne partirai pas de peur qu'ils n'en subissent les conséquences et ce serait montrer peu de foi pour mon Dieu.

 On la récupéra donc pour l'amener devant la foule. La surprise fut totale pour Quintien qui retrouvait celle qui hantait ces rêves et la foule qui avait quitté un corps sanguinolent en morceaux éparpillés.

-Mais qui t'a guérie ?

-C'est mon Dieu qui est venu me visiter !

-Voyons maintenant si tu vas guérir de cette nouvelle aventure.

Il ordonna de briser force vaisselles et verres tranchants et de les recouvrir de charbons ardents. Il dit de la mettre nue et de la promener en la roulant sur ce tapis de braises ardentes. Alors que le supplice atroce se déroulait le sol se mit à trembler et des colonnes tombèrent ensevelissant des proches amis de Quitien.

La foule apeurée y vit un mauvais présage et une réponse à la cruauté du gouverneur.

Il demanda de cesser et de la remettre en cellule.Là elle pria pour que Dieu l'accepte dans on royaume et dans un dernier cri s'échappa de son corps meurtri.

Ses fidèles la mirent au sarcophage et furent rejoints par de merveilleuses personnes sorties de nulle parte vêtues de blanc. Ils consacrèrent sa générosité et son courage et sa foi en Dieu.

On la para d'un voile blanc.

 

Voile blanc que l'on courut chercher alors que lave de l'Etna, bave incandescente de l'énorme Encelade menaçait la ville. On dressa face à la coulée le léger linge blanc.

Et la coulée s'arrêta !

 

Les deux femmes écoutaient le récit de l'homme qui les avait conduites au tombeau d'Agathe.

Euthicie, la mère était malade et souffrait d'un mal terrible qui la rongeait lui nouant les intestins et lui faisant perdre continuellement du sang.

Sa fille Lucie lui dit: « Vois mère comment Agathe a souffert pour notre Seigneur. Si tu touches son tombeau tu seras guérie ! »

 

Alhazen