Promenade au bord de l'eau.
Dès que ma mère rassemblait ses longs cheveux d'or roux, pour les tordre, en faire un chignon fixé bas dans le cou et y épingler son grand chapeau de paille nous savions que la promenade était imminente.
Une légère robe bleue serrée à la taille desssinait doucement le rebondi de ses hanches, la rangée de petits boutons qui auraient dû fermer le corsage arrêtait son ascension loin du col. Des espadrilles en toile, à talons compensés allongeaient le galbe de ses jambes que notre père admirait inlassablement.
Un sentier planté de joncs suivait la rive de l'Escaut, l'eau grise s'écoulait , simplement toublée par les larves de moustiques qui faisaient des ronds en se déplaçant.
De petits sauts en petits sauts nous passions sur les racines moussues d'un vieux chêne.
Par les éclaircies d'une haie de sureau on apercevait les étendues de seigle et d'avoine qui se préparaient pour la moisson.
Courbées dans les champs de lin, les cultivatrices, dont on ne voyait que la première syllabe , retiraient les chardons mauves indésirables dans les tiges bleues.
Un peu plus loin dans un mur d'aubépines aux charmes mystérieux ,les baies rouges bousculaient la blancheur des fleurs en exhalant une enivrante odeur de miel et de térébenthine.
Il arrivait souvent de croiser un cheval robuste marchant sur le chemin de halage, attelé à un câble, traînant loin derrière une péniche.
Les yeux fermés on entendait le vent courir dans les frondaisons, mon père lui entendait le chant du geai. Il disait " le geai cajole" on le voyait s'envoler dans un mélange de couleurs, brun, bleu et blanc.